Le premier mois de grossesse Par le Professeur René Frydman

Au cours des première semaines de grossesse, seuls quelques signes discrets sont susceptibles de vous alerter. Pour votre bébé, en revanche, c’est une petite révolution qui est en marche.

Certaines femmes sont vite convaincues d’attendre un enfant. Cette certitude intime ne s’explique pas vraiment. Les tout premiers signes sont en effet souvent très ténus : une vague pesanteur dans le bas-ventre, une tension dans la poitrine… Ce sont presque les mêmes symptômes qu’avant les règles. Et pourtant, quelque chose semble différent, ne serait-ce que l’absence de ce fréquent mal-être prémenstruel. L’achat d’un test de grossesse est alors presque une formalité. D’autres femmes, à l’inverse, ne s’étonnent que plusieurs jours après le retard des règles, surtout si celles-ci sont irrégulières, et, parmi elles, certaines n’osent pas vraiment croire qu’elles sont enceintes, même lorsque le test donne un résultat positif…

La fatigue, premier signe de la grossesse

Chez toutes les femmes enceintes, le premier trimestre implique un réel bouleversement physiologique, et ce dès les premières semaines. Les sécrétions hormonales augmentent. La quantité de sang dans l’organisme s’accroît (et le cœur bat plus vite). L’utérus commence à grossir. Les seins prennent du volume (surtout lors d’une première grossesse). Toutes ces modifications corporelles entraînent souvent de la fatigue et un besoin accru de sommeil. Mais il est possible qu’elles aient aussi d’autres effets, tantôt agréables (meilleur odorat, embellissement de la peau et des cheveux), tantôt désagréables (douleurs aux seins, nausées, constipation, brûlures d’estomac, envie plus fréquente d’uriner, essoufflement lors d’efforts). Toutes ces manifestations ne sont nullement systématiques, et il est rarissime qu’elles se trouvent réunies chez une seule et même femme. Enfin, leur présence ou leur absence n’est en aucun cas une indication d’un bon ou d’un mauvais déroulement de la grossesse. Par conséquent, si, à l’inverse de vos amies, vous êtes de ces femmes qui ne souffrent d’aucun désagrément, profitez-en pleinement et sans inquiétude.

Test de grossesse ou analyses en laboratoire ?

  • Avant le rendez-vous chez son médecin, divers moyens permettent de détecter dans le sang ou les urines la présence de l’hormone de grossesse, sécrétée dix jours après la fécondation (hormone gonadotrophine chorionique ou HCG).
  • Les tests de grossesse : le résultat est en général totalement fiable si le test est effectué deux à trois jours après le retard de règles (et s’il est positif). Cela varie toutefois selon les marques, et mieux vaut demander conseil au pharmacien.
  • Les analyses en laboratoire : une analyse d’urines détecte l’hormone de la grossesse (HCG) après deux jours de retard de règles. L’analyse de sang la révèle quatorze jours après la fécondation.

Une humeur fluctuante

Apprendre que l’on attend un enfant suscite en général beaucoup de bonheur, s’il est désiré. C’est aussi une période bouleversante, au sens propre du terme. Mais, là encore, il n’existe aucune norme, et les émotions ressenties varient beaucoup d’une femme à une autre. Il est néanmoins fréquent que la sensibilité soit davantage à fleur de peau. Les réactions face aux petits événements quotidiens sont souvent plus émotionnelles, s’accompagnant facilement, selon les cas, de fous rires, de larmes, de mouvements d’humeur, etc. Une certaine distraction, une tendance à la rêverie, une forme de détachement envers sa vie professionnelle marquent aussi parfois ces premiers temps. Tous ces éventuels changements d’attitude sont plus ou moins discrets, voire quasi inexistants, ou apparaissent plus tard. L’hypersensibilité, comme la succession de moments d’inquiétude, de joie ou de sérénité, ne sont que des manifestations possibles de tout ce qui se passe en soi, de façon plus ou moins consciente. Ils ne sont que les signes d’une révolution qui commence au plus profond de soi.

Les semaines d’aménorrhée

Vous entendrez sans doute souvent votre médecin parler de semaines d’aménorrhée (SA), c’est-à-dire de semaines d’absence de règles. « Six semaines d’aménorrhée (6 SA) » signifie que six semaines se sont écoulées depuis le premier jour de vos dernières règles. Mais si vous êtes enceinte, l’embryon n’est alors âgé que de 4 semaines, la fécondation survenant en général en milieu de cycle, soit environ deux semaines après le premier jour des règles. Rappelez–vous donc que 6 semaines d’aménorrhée (SA) égalent 4 semaines de gestation.

Bébé grandit déjà très vite

Au moment où vous constatez l’absence de vos règles, le futur bébé est déjà bien implanté dans l’utérus. Il y est parvenu trois à quatre jours après la fusion du spermatozoïde et de l’ovule. À son arrivée dans ce nid, il se présentait sous la forme d’un œuf mesurant à peine un dixième de millimètre mais comptant déjà une centaine de cellules. Une semaine plus tard, vers le 10e jour, il a déjà multiplié son volume par dix. Il comprendra bientôt trois couches de cellules distinctes qui, par des processus complexes, vont donner chacune naissance aux cellules spécialisées des divers organes, du squelette, de la peau, bref de tout ce qui constitue le corps humain.

Cœur et cerveau sont déjà à l’œuvre

À la fin du premier mois, sa silhouette ovale n’a pas encore une forme humaine, les futurs membres n’étant que des bourgeons. Mais les tissus se sont développés à une telle vitesse que l’embryon ne mesure pas moins de 5 mm. Plusieurs organes existent déjà à l’état d’ébauche, et notamment le cerveau et le cœur, un petit tube qui bat depuis le 20e jour environ et que vous entendrez peut-être lors d’une prochaine consultation (6 semaines d’aménorrhée).

La formation du futur placenta

La formation du placenta et des annexes (poche des eaux, cordon ombilical, membranes) s’ébauche elle aussi lors des premières semaines. Quand l’œuf commence à s’accoler telle une ventouse à la muqueuse de l’utérus, sa zone centrale se développe pour constituer peu à peu le futur embryon, tandis que sa zone périphérique forme une couche cellulaire bien insérée dans la paroi utérine et appelée trophoblaste. Cette zone d’échanges entre l’embryon et sa mère joue très vite un rôle nourricier et est à l’origine du futur placenta (voir Le quatrième mois de grossesse). Au fur et à mesure, une cavité va se creuser entre l’embryon et le trophoblaste. Plus l’embryon se développera, plus il s’éloignera de la paroi utérine. Lors du deuxième mois, il sera relié au trophoblaste par une ébauche de cordon ombilical et flottera dans une cavité emplie de liquide, la poche des eaux.

Hygiène de vie : des règles simples

  • Les précautions qui suivent valent pour les neuf mois à venir. Dans la mesure du possible, il est bénéfique de les suivre dès que possible. En début de grossesse, les principaux organes de l’embryon sont en train de se mettre en place et c’est à ce moment-là que le risque d’incident ou de malformation est le plus important. Bien que le bon développement du futur bébé soit pour beaucoup conditionné par des facteurs sur lesquels il est impossible d’agir, vous pouvez mettre toutes les chances de votre côté en respectant les conseils suivants :
    • Arrêter le tabac, l’alcool et bien sûr les drogues.
    • En cas de dépendance, il existe des aides (de nombreuses maternités accueillent par exemple une consultation en tabacologie et/ou en addictologie).
    • S’interdire désormais toute prise de médicaments sans avis médical (y compris ceux qui paraissent le plus anodin, comme l’aspirine).
    • Dites toujours que vous êtes enceinte avant des soins dentaires, avant un examen dans un cabinet de radiologie ou lors de tout rendez-vous avec un praticien spécialisé dans une médecine alternative.
  • Éviter d’inhaler des produits ménagers ou des décapants portant la mention « toxique » sur l’étiquette (par prudence, vous pouvez proscrire lors des courses tous les produits contenant des éthers de glycol, type éthylènes et propylènes) ; méfiez-vous également des insecticides, des pesticides et des herbicides. Une exposition brève et accidentelle à un produit toxique ne prête pas à conséquence, mais un usage répété peut s’avérer néfaste pour l’embryon.

S’inscrire aussitôt à la maternité ?

Outre la prise de rendez-vous avec le médecin, l’inscription en maternité est parfois la première démarche effectuée en début de grossesse. Si vous souhaitez accoucher dans une maternité bien précise, il est en effet nécessaire de vous inscrire dès que le test de grossesse est positif, sous peine de ne pas avoir de place. Si vous n’avez pas de souhait précis en la matière, vous pouvez attendre un peu et en discuter avec le médecin lors de la première consultation.

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